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ACTUSCIENCES


Biodiversité:
comment la mesurer?



Pour évaluer la biodiversité, il faut évidemment la mesurer. Dans le cadre de ce dossier, nous nous contentons de fournir quelques éléments pour comprendre comment la « diversité biologique » d’un écosystème peut être mesurée (il s’agit donc plutôt de la mesure de la diversité spécifique).

A priori, on pourrait penser que la biodiversité est relativement facile à appréhender puisqu’il suffirait de dénombrer à un endroit donné le nombre d’espèces qui y vivent. Toutefois, en pratique, on constate rapidement qu'il n'est pas si aisé de mener une telle mesure. Tout d’abord, cela va dépendre du milieu où l’on voudra déterminer cette biodiversité (biodiversité marine, des sols ou de la canopée forestière) : les moyens mis en place seront bien sûr différents. Mais en dehors de ces problèmes, disons techniques, l’expression de la biodiversité par un chiffre unique ne pourra rendre compte de toutes ses composantes. En pratique on dispose de toute une série de méthodes et d’indices pour mesurer cette diversité.

On pourra évoquer des paramètres comme le nombre d'espèces, leur abondance absolue ou relative. A cela, s'ajoutent des variables beaucoup plus difficiles à décrire, telles que la distribution spatiale et les fluctuations au cours du temps des populations en question.

Une première approche consiste à mesurer le nombre d’espèces présentes dans une région donnée (richesse spécifique) ou le nombre d'allèles (copies différentes d’un même gène) qu'une espèce possède pour un même locus. Mais on pourrait également déterminer le nombre de groupes taxonomiques d'un rang supérieur à celui de l'espèce qui sont présents (genres, familles, ordre,…). Toutefois, cette méthode dépend de la taille des échantillons et de la surface échantillonnée et ne considère pas l'abondance relative des différentes espèces. Sa valeur écologique est donc limitée.

L’abondance est une autre composante importante de la diversité qui doit être mise en perspective avec la notion d’équitabilité, c’est-à-dire avec l'égalité de la répartition des individus parmi les espèces. Un grand nombre d'espèces fait augmenter la diversité spécifique, et une distribution égale ou équitable parmi les espèces représente aussi une plus grande diversité. Par contre, si la grande majorité des individus prélevés appartiennent à la même espèce, on aura une faible diversité.

On peut donner une idée de l'ampleur du problème en donnant un petit exemple. Nous voulons estimer la biodiversité des fourmis sur le sol d'un fragment de forêt tropicale de 1 km 2 , ce qui représente une surface relativement petite. Or, une surface de 100 m2 représente déjà plusieurs milliers d'individus et un travail considérable de récolte et d'identification. Evaluer la diversité de 1 km 2 à partir d'un échantillonnage de 100 m2 représente une extrapolation d'un facteur 10000 ! Rien que pour estimer le nombre d'espèces, il est clair que l'on n'aura pas sur 100 m2 toutes les espèces présentes sur 1 km 2, mais qu'il n'y a pas non plus 10000 fois plus d'espèces sur 1 km 2 que sur 100 m2! Il a donc fallu développer des méthodes statistiques d'extrapolation qui permettent d'évaluer, au départ d'un échantillonnage nécessairement restreint, les différents paramètres qui caractérisent la biodiversité au niveau de l'écosystème (nombre d'espèces, indices d'hétérogénéité, etc.). Ces méthodes se basent généralement sur la manière dont le nombre d'espèces répertoriées évolue en fonction de l'effort d'échantillonnage. Ces "courbes d'accumulation d'espèces" sont toujours croissantes (plus on cherche, plus on trouve), mais croissent de moins en moins vite (il devient de plus en plus difficile de trouver de nouvelles espèces). La forme de ces courbes et les paramètres qui les caractérisent dépendent notamment de l'abondance relative et de la distribution des espèces.

Encore aujourd’hui, les scientifiques ne sont pas tous d’accord sur la méthode à adopter pour exprimer de manière la plus pertinente les dimensions d’abondance et d’équitabilité. Il existe à cet effet un grand nombre d’indices dont les plus utilisés sont les indices de pour n’en citer que deux. Shannon et de Simpson, pour n’en citer que deux.

Cet examen succinct n’a d’autre but que de montrer que la mesure d’une diversité biologique est bien plus difficile que ce que l’on pourrait croire, puisque nous sommes confrontés à une notion multi-dimensionnelle complexe qui ne peut être entièrement définie (ou résumée) par un seul paramètre…ce qui suscite encore de nombreux débats.