Eviter un «printemps silencieux»
Faut-il suspendre ou interdire lusage dinsecticides très toxiques pour les abeilles ? Le Parlement wallon ouvre le débat. La France annonce des mesures.
Perte dorientation, comportement anormal, mortalité importante. Depuis quatre ans, les abeilles tombent comme des mouches. La chimie serait à la source du mal. Faut-il craindre un « printemps silencieux », comme limaginait le célèbre ouvrage de Rachel Carson en 1968 ? Incriminés, deux insecticides utilisés pour les cultures de maïs ou de betteraves en Belgique (le Gaucho (Bayer) et le Régent (BASF)) sont pointés du doigt comme les fauteurs de troubles, engendrant des pertes économiques sèches au secteur apicole et posant des problèmes sanitaires inquiétants.
Initiées par la députée Marie-Rose Cavalier (Écolo), qui plaide pour la suspension de lautorisation de ces produits au nom du principe de précaution, des auditions publiques de tous les acteurs concernés ont permis aux parlementaires wallons, ce jeudi, de se forger une première idée à lissue dun débat conduit dans la sérénité. Pour les apiculteurs, le bourdon des abeilles nest ni imputable aux caprices de la météo, ni aux maladies classiques comme la varroase.
De nouveaux insecticides neurotoxiques (voir dossier) ont fait leur apparition dans les années nonante, résume Hubert Guerriat, président des apiculteurs du Hainaut. Ces insecticides, qui enrobent la graine, migrent dans la plante entière et se dégradent lentement dans le sol. Ils se retrouvent dans le pollen du maïs que les colonies récoltent parfois en abondance.
Résultats des courses : lorsquelles ne dépérissent pas en pleine saison, les colonies péricliteront souvent le printemps suivant en consommant les réserves de pollen. Ces produits agissent à des doses très faibles, ponctue Etienne Bruneau, du Centre apicole de recherche de Louvain-la-Neuve (Cari). On observe des effets neurologiques sur les abeilles dès quelles sont en contact avec du pollen contenant des concentrations du produit de lordre du dix-milliardième.
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La sécurité du Gaucho, tant pour lhomme que pour lenvironnement est garantie et confirmée par les procédures dhomologation et de réhomologation très rigoureuses dans plus de 100 pays à travers le monde, fait valoir Hervé Tossens, manager chez Bayer. (note d'ActuSciences : voir extraits parus dans Le Monde dans ce dossier) Gaucho ne présente aucun risque pour les abeilles dans les conditions dutilisation homologuée. Cette absence de risque a été confirmée par de nombreuses recherches intensives, aussi bien réalisées par Bayer que par des chercheurs réputés et indépendants.
Bayer fait valoir en outre que lusage du Gaucho dans les cultures de maïs ne concerne que 6.000 hectares en Belgique.
Faut-il suspendre lautorisation de ces produits afin dy voir plus clair ? Le professeur Eric Hautbrugge (Gembloux), estime que supprimer une substance ne résoudra sans doute pas le problème dans la mesure où « leffet de synergie » entre plusieurs produits peut être prépondérant. Linteraction dun insecticide et dun fongicide peut multiplier leffet toxique jusquà 244 fois !
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Précisons enfin que le retrait dagrément de ce type de produits dépend du ministère fédéral de la Santé. Le ministre Rudy Demotte (PS) a fait récemment savoir quil nenvisageait pas de prendre de décision en ce sens contrairement à son homologue français de lagriculture, qui annonce une mesure imminente de restriction, voire dinterdiction concernant le Régent.
Le débat parlementaire rependra le 18 mars.
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